Léa est dermatillomane.


Elle m'a contacté avec détermination et foi, afin de se libérer, de se voir, de véritablement s'incarner. Son histoire m'a parlé, m'a touché, je l'ai ressentie.


Mes clientes sont bien souvent à mon image; dans cette quête du soi, de l'amour, de liberté, pleines d'envies, pleines d'envie de se sentir en vie.

Pour réaliser cette séance photo, je suis allée la rejoindre en Loire-Atlantique, à Saint-Brevin-les-Pins. Notre connexion a été forte, pleine de moments de vulnérabilité, de beauté, et d'une pureté que seules deux âmes qui se comprennent et se trouvent peuvent ressentir.


Je ne suis pas psychologue. Je n'ai pas de certification de thérapeute. Je ne suis que photographe. Une photographe qui essai à son infime échelle de vous aider sur votre chemin de guérison. Et je vous encourage à vous soigner, soigner vos maux, par toutes les manières possibles; et en particulier avec l'aide d'un.e psychologue. Mon travail à moi vient bien après, parfois pendant la thérapie, parfois en dernier; et il est de vous montrer à vous-même. De vous reconnaître. Et, grâce à nos images créées ensemble, à vous aimer un peu plus.


Voici le beau témoignage de Léa.
photo thérapie loire atlantique
photographe boudoir
"Poser des actes, s’inscrire dans le réel, pour ensuite se métamorphoser.


Il est 7h du matin, je me réveille avec la lumière du jour. Mes mains caressent le sable, j’observe le jour illuminer peu à peu la plage autour de moi. Une tristesse immense m’envahit… je la laisse venir. Lui se réveille avec mes sanglots…

“- Qu’est ce qu’il se passe ?

- ...

- Pourquoi tu pleures ?

- …

- Tu pleures parce que c’est beau ?

- Non…

- …

- Je pleure parce que c’est fini… je ne t’aime plus…

- …

- J’suis désolé mais fallait que je te le dise…

- Tu fais bien… c’est pas grave…”

Oui oui *je rigole* il m’a dit que ce n’était pas grave… Il commence à se rendormir discrètement alors que je suis assise là, sans trop savoir comment lui dire au revoir. Je me lève, toujours en pleurant. Je prend mes affaires et il réagit à nouveau :

“ - Tu fais quoi ?

- J’en ai marre d’attendre, je m’en vais…”


“J’ai envie d’avancer/changer/faire bouger les choses mais je n’y arrive pas. Souvent à cet endroit là, on place le fameux “je m’auto-sabote”. [...] Attendre c'est refuser d’avancer, pour avoir la preuve qu’on aura pas, pour continuer d’incarner ce personnage de celui qui n’y arrive pas, qui a des blocages. [...] Pour continuer de ne pas décider pour Soi et par Soi. ”(1) 


Ce jour-là, j’ai décidé de me choisir, en m’autorisant à sortir de ce personnage. 

Non, je n’attendrais plus que les choses passent, je ne me laisserai plus guider par les désirs et besoins des autres au détriment des miens. Ce jour-là j'ai affirmé ma souveraineté.

Les blocages essentiels ne se règlent pas comme on pourrait boucher un trou dans le mur avec un peu de plâtre. Cela demande de se pencher franchement sur notre profondeur d’être, c’est cultiver sa souveraineté comme un sol à besoin d’être fertile pour y voir pousser les graines qu’on veut semer. Si on souhaite déplacer les choses de manière fondamentale, il faut être prêt à se relier à cette puissance en nous. Et pour cela on a besoin de s’ancrer, se trouver un lieu dans lequel notre manière de nous poser dans la vie est renouvelé et ainsi se réancrer dans la dimension la plus vivante et la plus féconde de notre propre humanité. Enfin se sentir libre. (2)


Quelques semaines auparavant, je ressentais déjà fortement cet appel d'émancipation, ce besoin de me sentir relier à moi-même, de me suffir à moi-même, de carrément redéfinir les contours de mon identité (3), d’avancer, de grandir tout simplement ! Dans cet élan d’espoir, j’ai contacté Anne-Constance. Quelque chose en moi avait besoin d’être transcendé avant de pouvoir totalement éclore. Son travail faisait écho. Sans chercher à comprendre, je me suis sortie de cette zone de confort qu’est le contrôle de mon image. 

Cette image qui jusqu’ici était restée timide dans sa véritable allure. Difficile de se voir tel que l’on est vraiment n’est-ce pas ?

photographe boudoir plage
photos boudoir paris
Je suis atteinte de dermatillomanie.

Ce trouble obsessionnel compulsif se caractérise par des crises de scarification répétitive. Telle une traque sans relâche, je triture chaque imperfection comme si ma vie en dépendait. Mes bras, mon torse, mon visage, sont dans un tel état à la fin d'une crise que je n'ose plus bouger. Comme coincée dans une spirale infernale qui m'aspire parfois jusqu'à l'épuisement le plus total.

Arrive un moment, où j’en reviens encore à cette attente :  "Faites que quelque chose, quelqu’un, ou que sais-je ! me délivre enfin de cette violence !” Mais je suis seule devant mon miroir. Et lorsque je me reconnecte enfin à la réalité, que mes yeux rencontrent à nouveau mon regard, mes pensées ne sont plus qu'un tourbillon de critiques de cette brutalité incommensurable.


Au fil du temps, armée de courage, de conscience et d'une présence toute particulière à moi-même, mon rapport à mon corps et à mon image se sont relativement apaisés. 

Mais parce qu’il me tient à cœur de le rappeler :

la prise de conscience est “seulement” une première étape au processus de guérison

et que, peu importe la relation à notre corps, ce combat est inégal et flexible. Bien qu’il soit encore tabou, il n'en est pas moins une norme de notre société actuelle. C’est un constat que j’ai pu observer très vite ! Dès lors que je me suis autorisée à me dévoiler, un immense soulagement s'est emparé de moi : je ne suis pas seule. À partir de là, beaucoup de mes rencontres et échanges montrèrent que chacun pouvait se reconnaitre dans cette démarche existentielle, quelque part entre la peur de ne pas être suffisamment beau* pour plaire (à soi et aux autres) et le désir brûlant d’exister véritablement. Avoir l’audace d’éclairer des parts de soi, malgré cette crainte de ne pas être estimer par autrui, ou de ne pas se croire capable de s’accepter tel que l’on est vraiment.

*je parle de beauté sur tous les plans


Une quête de vérité.

“Je veux être vrai avec moi-même, avec les autres.” Pour cela, sentons nous prêt à ouvrir en grand nos failles. Se confronter à ses ombres, c’est se confronter à sa réalité. Et c’est d'ailleurs pour cette raison qu’il est difficile de s’y plonger : si depuis l’enfance on cultive notre gentillesse pour plaire, pour se sentir intégré, au lieu d’apprendre à exprimer nos besoins, nos envies, en osant dire ce qui sonne vrai pour nous, on s’oublie au détriment d’une insécurité permanente. Né ainsi le sentiment d’être insuffisant, de ne pas être aimé pour ce que l’on est vraiment, mais pour l’image que l’on renvoie. C’est pourquoi il est indispensable d’être impartial, pragmatique et sans jugement envers soi-même pour enfin arriver à traverser les remises en question, les doutes et les souffrances, sans perdre pied. Lorsqu’on parvient avec le temps, à se contempler, à développer son observation sans pour autant que cela devienne un piège du mental, on commence alors à devenir son propre guérisseur. Tout doucement, on ouvre enfin l’espace qui était jusque-là saturé de pensées néfastes, de dévalorisation, de peurs irrationnelles et de toutes sortes de jugements. Le travail est de taille mon ami ! N'ai pas peur des épines si la rose en vaut la peine.


Alors même que depuis des années je pensais que cette rupture avec mon corps multidimensionnel était inéluctable, j’ai tout de même choisi de semer une graine d’espoir. Même lorsque mes ombres prennent le dessus sur mes lumières, je m’efforce à croire que, puisque les deux sont indissociables, il y a forcément une part de lumière dans l’ombre et inversement.

Quelle est-elle ?

photographe loire atlantique
photographe boudoir paris
thérapie par l'image
Inspirer, donner du courage.


“Ce que j'imagine, ce sont des photos qui me rappelleront, chaque fois que je les verrai, le parcours qui est le mien et la nécessité de continuer à m'accueillir tel que je suis. Et si en plus, je peux les publier en donnant de l'espoir à celles et ceux qui souffrent du même trouble que moi, j'aurai tout gagner ahah !” (4)


Je ne suis pas partisane de la pensée positive car elle n’est pour moi qu’un nouvel enfermement dans le perfectionnisme. Le prisme par lequel je tente de voir toute chose est toujours composé de deux opposés. Je cite ici le chapitre huit appelé “Convoquer mes forces au plus profond de moi”, extrait du livre de Fabrice Midal “Comment rester serein quand tout s’effondre”, que je trouve tout à fait éclairant :


“J’ai peur de prendre la parole en public, j’ai peur d’être mal jugé, j’ai peur d’avoir mal, je ne veux pas prendre le risque de me blesser… Nous en venons à ignorer nos propres capacités. On nous apprend à renoncer là où il nous faudrait apprendre à nous dépasser. [...] L’illusion d’un monde bienveillant et harmonieux, où les seules surprises seraient de “bonnes nouvelles” et où tout conflit serait dépassé avant même de surgir, est la source même de notre impuissance. Ce monde-là n’existe pas. Et heureusement ! Refuser les épreuves, les mauvaises surprises, le négatif, c’est ne plus pouvoir grandir, exulter, tomber, me relever, découvrir mes forces et apprendre la confiance en moi, avancer. Je ne veux pas d’un monde où je ne serais pas tous les jours confronté à ce que Hegel appelle la négativité. Ce mot nous donne des frissons, il nous fait peur. Pourtant, explique Hegel, aucune positivité ne se construit sans un rapport au négatif. Ce principe vaut jusque dans les dissertations que nous apprenons à rédiger au lycée : la thèse, qui est l’affirmation de l’idée, le positif, est suivie de l'antithèse qui l’interroge, lui répond, entre en conflit avec elle, lui permet de ne pas rester incomplète, creuse, abstraite. En traversant la contradiction, la synthèse émerge, intégrant la négativité pour créer une réponse nouvelle, vivante. Sans ce mouvement entre le négatif et le positif, l’idée posée au départ reste unilatérale, sans relief, morte. La dissertation n’est plus qu’une déclaration de principes.”


Oser être soi ne peut que passer par l’admission de nos imperfections.

C’est se reconsidérer dans sa globalité en osant se dévoiler complètement (au moins à soi-même) et en acceptant ses contradictions. Voir le beau et le laid. Dépasser toutes sortes d’auto-critiques prérequis par la nécessité de se sentir accepter, intègre. Tu n’as pas besoin d’être comme-ci ou comme-ça pour être, pour exister et “mériter le bonheur”. Être est suffisant. Laisse la vie t’irradier de ses mouvements. Qu’ils soient intenses, brûlants, interminables, discrets ou incontrôlables, ils sont la preuve que tu es en vie, que tu fais l’expérience d’être humain. Laisse toi toucher par la beauté de cette complexité, de cette immense richesse ! Oublie le concept manichéen et binaire du mal et du bien. Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises personnes, il n'y a pas de bons ou mauvais côtés de toi, il y a seulement des gens qui souffrent et des morceaux de toi que tu laisses suffoquer dans un coin.


Quand j’ai besoin de trouver la force d’assumer qui je suis, que lorsque cette posture qui me ramène systématiquement à ma peur du rejet est trop dure à surmonter, je me rappelle que j’ai le choix entre me taire ou inspirer. Inspirer aux changements, inspirer au vrai, à l’authenticité, au partage. Tel que l’ont fait certain(e)s qui ont su réveiller chez moi la force d’être vulnérable, inconsolable et malgré tout heureuse, de savoir se laisser toucher sans pour autant se laisser détruire, mais aussi la détermination d’avancer et la quintessence de ma propre vérité. Mais j’ai aussi le droit (et le devoir) de me préserver, de ne pas être guerrière chaque jour de ma vie. Et toi aussi ! J'aime rappeler que nous sommes tous un grand tout variable et que la richesse d'une vie se limite seulement à notre propre perception.

dermatillomanie photo
thérapie par l'image
portrait boudoir paris
Donner de la visibilité à mon trouble,

c’est évidemment me confronter à mes propres peurs, et notamment l’une des plus profondes : la peur d’être rejetée. 

De quoi suis-je légitime de parler ? Au nom de quoi ? Pour qui ? Pourquoi ? Est-ce que tout ça est une fois de plus le fruit de mon égo en attente de validation ?


Parler de tout ça, c’est admettre une fois de plus que cela existe. Divulguer mes pensées intimes, reconnaître l’existence de mon trouble et des réflexions qui y sont liées, c’est poser une fois de plus dans le réel ce que je fuis : l’existence de mes peurs.


Cette séance photo, et cet article qui s'ensuit, étaient et resteront une véritable mise à nue.

Et cela je l’ai compris durant la séance, en m’accordant le droit de simplement être là, présente à cet instant suspendu, hors du temps, un peu magique finalement. Des larmes d’une douceur infinie, d’un amour sans condition pour cette personne que je suis, ont coulés… Et coulent encore… Encore et encore. La découverte de cette galerie… pareil… encore des larmes. Des larmes de joie, sois en sûr ! Car rien n’est plus beau que de se sentir pleinement soi-même, accepter dans le regard bienveillant de l'autre qui nous voit rayonnant de sensibilité, de beauté véritable, et en repoussant le superflu, en s’accordant cette chance de pouvoir se réconcilier avec soi, avec son passé, ses blessures, ses échecs, ses angoisses, ses doutes (ses montagnes de doutes !!), mais aussi sa part de soi la plus lumineuse… bref se réconcilier avec sa propre humanité !


C'est ainsi que l'expérience dépasse la simple séance photo. Qu'elle répond à un appel puissant de vie, pour finalement se transformer en une profonde gratitude. Elle devient la manifestation de ma souveraineté et la mémoire de mon chemin si singulier soit-il. 


“Je laisse derrière moi celle que j’ai été

Que j'ai été, que j'enterre parce qu'encore je la traine

Je la traine, je me traine parfois

Je lui dis à jamais au revoir à jamais toi celle que j'ai été

Que j'ai été, que j'enterre parce que pour avancer

Avancer je dois me faire légère

Pour accueillir le printemps dans ma vie

Comme une raison d'aller

De l'avant de toujours avancer

Pousser et fleurir quand tourneront les vents.” (5)


Un immense merci à Anne-Constance, et à tous mes proches qui m’accordent un espace précieux pour m’exprimer et ainsi me permettre d’être pleinement qui je suis.


(1) publication instagram de @personnamoon_ “Quand nos mouvements pour évoluer s’opposent à nos objectifs”

(2) Extrait d’un cours de méditation avec Fabrice Midal “Découvrez votre propre souveraineté”

(3) Anecdote véridique : le jour de cette rupture j’ai égaré mon passeport.

(4) Extrait de ma demande de shooting

(5) Barbara Pravi, “Prière au Printemps”

thérapie par l'image photographe